Si le premier objectif d’un contrat de prévoyance liée est de se garantir un capital retraite supplémentaire, il s’agit également d’une épargne qui permet de mettre vos proches à l’abri. En effet, certaines dispositions sont applicables en cas de décès de la personne assurée. Dans le cadre du 3a, sachez que vous n’êtes pas libre de faire comme bon vous semble !
Alors quelles sont les dispositions en matière de clause bénéficiaire ? Comment éviter une action en réduction de vos héritiers réservataires ? A ce sujet, quelles sont les modifications apportées par la réforme du droit successoral qui entrera en vigueur le 1er janvier 2023 ?
Comme nous l’avons souvent dit, un contrat de prévoyance liée est un véritable outil de gestion patrimoniale, notamment en matière de transmission à un héritier non réservataire !
La notion de clause bénéficiaire d’une prévoyance liée
Un contrat de prévoyance individuelle liée permet de couvrir les risques de vieillesse, de décès et d’invalidité. Bien évidemment, dans le cadre d’un 3a, l’objectif de souscription est de se constituer un capital complémentaire pour la retraite. De fait, ce type de contrat, accessible uniquement aux personnes ayant une activité lucrative, domiciliées et imposées en Suisse, est soumis à une durée de placement. Le contrat doit arriver à terme au plus tôt 5 ans avant l’âge de la retraite de la personne assurée. D’ailleurs, dans une prévoyance liée 3a, le preneur d’assurance et la personne assurée sont obligatoirement identiques. A l’inverse, dans une prévoyance libre 3b, elles peuvent être des personnes différentes.
Comme nous l’avons dit précédemment, une prévoyance liée permet de couvrir 3 risques, toutefois, le but premier est de se garantir un complément de retraite, mais cela n’empêche pas de couvrir le risque décès. Ici, bien sûr, il faut comprendre le décès de la personne assurée avant le dénouement du contrat, à savoir, l’âge de la retraite. Une police 3a est en quelque sorte un contrat d’épargne qui va capitaliser tout au long des années de versements. Cela signifie qu’en cas de décès, le capital garanti prévu au terme du contrat est versé aux bénéficiaires pour un 3ème pilier en assurance. C’est d’ailleurs l’une des différences majeures qui existe entre un 3ème pilier en assurance et bancaire. Dans le cadre du 3ème pilier bancaire, les bénéficiaires ne percevront que les primes effectivement versées. De même, vous ne pouvez bénéficier de la couverture incapacité de gains.
N’hésitez pas à lire notre article : “Comment choisir entre le 3ème pilier assurance ou bancaire ?” !
Par contre, une chose est certaine, c’est que quel que soit le contrat, en assurance ou bancaire, la réglementation de la clause bénéficiaire est la même. La clause bénéficiaire d’un pilier 3a est réglementée par l’ordonnance sur les déductions admises fiscalement pour les cotisations versées à des formes reconnues de prévoyance (OPP3).
La clause bénéficiaire légale
L’article 2 de l’ordonnance OPP3 stipule :
“Les personnes suivantes ont qualité de bénéficiaires :
- en cas de survie, le preneur de prévoyance ;
- en cas de décès de celui-ci, les personnes ci-après dans l’ordre suivant :
- le conjoint survivant ou le partenaire enregistré survivant,
- les descendants directs ainsi que les personnes à l’entretien desquelles le défunt subvenait de façon substantielle, ou la personne qui avait formé avec lui une communauté de vie ininterrompue d’au moins cinq ans immédiatement avant le décès ou qui doit subvenir à l’entretien d’un ou de plusieurs enfants communs,
- les parents,
- les frères et sœurs,
- les autres héritiers.”
Cette clause bénéficiaire 3a est ce que l’on appelle la clause légale, il est impossible d’y déroger ou d’en modifier l’ordre.
Les adaptations possibles pour la clause bénéficiaire 3a
Toutefois, voici quelques petites précisions :
- Le preneur d’assurance peut désigner un ou plusieurs bénéficiaires parmi les personnes mentionnées au point 2 et préciser leurs droits.
Par exemple, X et Y vivent ensemble depuis 6 ans sans être mariés et ont deux enfants en commun. X a souscrit une assurance vie liée et précise qu’en cas de décès la moitié du capital ira pour Y et que l’autre moitié sera partagée en parts égales entre les 2 enfants.
Si aucune mention n’avait été faite, l’OFAS (Office Fédéral des Assurances Sociales) est d’avis de répartir en parts égales en faveur des bénéficiaires. Ainsi, Y et les 2 enfants auraient chacun perçu un tiers du capital assuré en cas de décès.
- Le preneur d’assurance a le droit de modifier l’ordre des bénéficiaires des points 3, 4 et 5, et de préciser leurs droits.
La réforme du droit successoral pour le 1er janvier 2023
La prévoyance liée est exclue de la masse successorale, toutefois, les prétentions du 3a sont prises en compte dans la masse des calculs des réserves, uniquement pour leur valeur de rachat et non pour la capital assuré. Cela signifie qu’un héritier réservataire lésé pourrait agir en réduction contre les bénéficiaires du pilier 3a pour la partie manquante.
Si nous reprenons, notre exemple précédent, X et Y n’étant pas mariés, Y n’est pas un héritier réservataire, seuls les 2 enfants le sont. Ainsi, il ne faut pas que la part versée à Y viennent ponctionner la part réservataire des enfants. Avant l’entrée en vigueur de la réforme du droit successoral, cette part réservataire en présence de descendants et en l’absence de conjoint ou partenaire enregistré est de 75 % de la masse successorale. Cela signifie que X est libre de transmettre à Y uniquement ¼ de son patrimoine global, appelé la quotité disponible.
Une plus grande liberté pour le testateur avec la réduction de la réserve légale
Au 1er janvier 2023 entrera en vigueur le nouveau droit des successions. Celui-ci apporte une plus grande liberté au testateur en venant réduire la part réservataire.
Les nouvelles dispositions légales sont :
- La réduction de la réserve héréditaire des descendants (1ère parentèle) à la 1/2 de leur part successorale légale. L’art. 471 du Code civil sera modifié. Jusqu’au 1er janvier 2023, la part réservataire des descendants était de 3/4 de la masse successorale légale.
- La suppression de la réserve héréditaire des parents (2ème parentèle) qui avant le 1er janvier 2023 avait droit à la moitié de la part légale. Cela signifie qu’une personne sans conjoint ou partenaire enregistré et sans descendants, dont les parents sont toujours vivants, dispose de la pleine quotité disponible. Il peut ainsi désigner n’importe quelle personne tierce en tant qu’héritier.
Par contre, la réserve héréditaire du conjoint survivant ou partenaire enregistré est maintenue à la 1/2 de sa part successorale.
Avec cette réforme, le testateur dispose d’une plus grande marge de manœuvre lors de la planification de sa succession, notamment avec l’augmentation de la quotité disponible.
Suppression du droit à la part réservataire en cas de procédure de divorce
La réforme du droit successoral apporte également une modification de taille en ce qui concerne le conjoint et plus précisément, en cas de procédure de divorce. En effet, jusqu’à cette modification qui entrera en vigueur le 1er janvier 2023, les époux restent héritiers l’un de l’autre jusqu’à l’entrée en force du jugement de divorce. Cela signifie qu’en cas de décès de l’un des conjoints ou d’un partenaire enregistré au cours de la procédure, le survivant a droit à sa part réservataire.
Après cette réforme, le conjoint survivant ou le partenaire enregistré n’aura plus droit à sa part réservataire dès lors qu’une procédure de divorce ou qu’une dissolution du partenariat sera en cours.
En matière de transmission, une prévoyance liée peut, de fait, s’avérer intéressante fiscalement. En cas de décès, l’impôt du 3a ne prend pas en compte le lien de parenté. Le versement sous forme de capital est imposé séparément des autres revenus à un taux réduit, qui dépend du canton de résidence et du montant du versement. Ainsi, en présence d’un concubin par exemple, il est préférable de transmettre un capital en 3a à un taux réduit, qu’une partie de sa masse successorale qui sera soumise à des droits de succession qui, eux, tiennent compte du degré de parenté.